Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, les mesures étaient d'une extrême diversité. Des mesures de même nature et de valeurs voisines avaient des appellations différentes selon les provinces, voire les villes ou les villages d'une même région. À l'inverse, le contenu physique de mesures de même nom différait en général selon les lieux et aussi selon la corporation intéressée ou l'objet mesuré.
La nécessité de mesurer s'est alors fait ressentir autour de deux besoins :
Un roi, une loi, un poids et une mesure !. Il a donc fallu inventer les différentes unités (mètre et kilogramme notamment) utiles au commerce. L'évêque député Talleyrand proposa, afin que ces nouvelles unités fussent acceptées par tous, qu'elles respectent le principe suivant :
Les unités ne devront présenter rien d'arbitraire, ni de particulier, à la situation d'aucun peuple sur la terre.
Après réflexion, il fut décidé que le mètre aurait pour définition :
Le mètre
est égal à la dix millionième partie du quart du méridien terrestre
.
Il fallut près de 7 ans à deux astronomes de l'époque, Delambre et Méchain, pour
mesurer une partie de méridien terrestre entre Dunkerque et Barcelone, mesure qui
permit de réaliser un étalon matérialisant la définition du mètre. Depuis cette
époque, le mètre en est à sa quatrième définition :
Le mètre est égal à la
distance parcourue dans le vide par la lumière en une durée de 1/299 792 458 seconde
.
Évidemment, toutes les autres unités du système international s'appuient sur des définitions de ce type. Le kilogramme (kg) est la dernière unité à avoir été redéfinie ainsi en 2019 à partir de la valeur numérique fixée de la constante de Planck.
Très rapidement, et afin de répondre aux aspirations du peuple - avoir confiance dans les résultats de mesure - l'état a mis en place un service, la métrologie légale, chargé de garantir l'honnêteté des échanges commerciaux et l'égalité des citoyens devant les résultats de mesure. Ainsi, tous les instruments intervenant dans le cadre de transactions commerciales font l'objet de vérifications périodiques exécutées suivant des décrets applicables partout en France. Ces vérifications ont pour objectif de s'assurer que les instruments (juste les instruments !) restent dans les limites fixées par leur décret respectif. Plus personne aujourd'hui ne doute des résultats de mesure. Dans notre inconscient collectif, la valeur mesurée est devenue la valeur vraie. La métrologie légale a donc accompli sa mission avec succès. Mais les objectifs de la métrologie légale et de la métrologie industrielle sont-ils les mêmes ?
Contrairement à ce que nous a inculqué, souvent de façon implicite, notre culture citoyenne, la valeur mesurée n'est jamais la valeur vraie. Si cela s'est avéré bénéfique dans le cadre de notre vie quotidienne, il n'en est pas de même dans le cadre de l'industrie. En effet, si la métrologie légale vise à obtenir l'honnêteté et l'égalité, la métrologie industrielle doit garantir LA FONCTIONNALITÉ !
L'ensemble des facteurs intervenant dans le processus de mesure contribue à dégrader le résultat de la mesure :
Dès lors, le résultat d'une mesure ne peut s'écrire sous la forme unique d'une valeur numérique « Diamètre mesuré = 20,012 mm » mais doit être, pour donner une idée de ce que peut être la valeur vraie de la grandeur mesurée, exprimé sous la forme « Diamètre mesuré = (20,012 ± 0,008) mm ».
Ainsi, la valeur vraie du diamètre considéré se trouve dans l'intervalle :
Ensemble des valeurs qui peuvent être raisonnablementC'est pourquoi les différents référentiels qualité imposent, d'une façon ou d'une autre, la prise en compte de l'incertitude de mesure dans la déclaration de conformité d'un produit, à l'instar du chapitre 4.11 de la norme ISO 9001 (1994) :
(…) les incertitudes de mesure sont connues et compatibles avec l'aptitude requise en matière de mesurage (…)
Afin de répondre à cette exigence, tout le monde aujourd'hui connaît l'obligation d'étalonner ses instruments de mesure, c'est à dire d'évaluer, par comparaison à des étalons matérialisant les unités de référence, les erreurs des instruments de mesure. Cette opération, si elle est inévitable dans le cadre de la recherche des incertitudes de mesure, n'est pas la seule disposition à prendre. Au même titre que l'instrument a ses propres erreurs et qu'il faut les connaître, il est également nécessaire de prendre en considération les erreurs provenant de tous les autres acteurs du processus de mesure : l'opérateur, la technique utilisée, l'environnement, etc.
L'ISO (International Organization for Standardization) a édité un référentiel, reconnu aujourd'hui internationalement, qui propose une méthode d'évaluation de l'incertitude de mesure : GUM : ISO/CEI Guide 98-3 : « Guide pour l'expression de l'incertitude de mesure ». Il existe également (applicable plus particulièrement aux laboratoires d'essais) une série de normes dans laquelle est décrite une approche plus expérimentale : les normes de la série ISO 5725.
Associé à ces normes de calculs, l'ISO publie d'autres normes permettant aux industriels de définir des stratégies concernant la prise en compte de l'incertitude de mesure dans la déclaration de conformité : la norme ISO 14253-1 (2000) : « Spécification géométrique des produits (GPS) - Vérification par la mesure des pièces et équipements de mesure ».
Par ailleurs, les constructeurs automobiles ont également développé des méthodes expérimentales, applicables dans d'autres secteurs d'activité, basées sur la notion de « capabilité » du processus de mesure. La capabilité d'un processus de mesure se détermine par le rapport de la tolérance à vérifier sur l'incertitude de mesure (ou le contraire).
Aujourd'hui, le métrologue doit s'inscrire dans une démarche de progrès qui visera à améliorer la productivité, donc la compétitivité de l'entreprise. En effet, la prise de conscience des incertitudes de mesure doit conduire à la remise en cause des tolérances. Elle ne doit pas se présenter, en niant la réalité actuelle, comme une contrainte supplémentaire.
En métrologie, chaque euro dépensé doit être un euro investi !
Les indicateurs doivent être plus ambitieux qu'aujourd'hui :
Si l’on s’en réfère à l’étymologie, « métrologie » signifie « science de la mesure ». L’approche des mesures en entreprise devrait donc se situer dans un domaine où la rigueur et la rationalité règnent en maîtres. Et pourtant, force est de constater que, encore aujourd’hui, la métrologie fait l’objet d’un certain nombre de croyances qui ont la vie dure et qui, de fait, perturbent la performance industrielle, tant sur le plan technique que sur le plan économique.
La Smart Metrology ou métrologie des décisions pertinentes constitue donc une nouvelle façon de voir le rôle de la métrologie dans le monde industriel qui respecte les pratiques antérieures tout en introduisant des notions nouvelles, notamment orientées Big Data.
Deltamu propose un panel de services complet pour vous accompagner.